Bordels à négresses

Bordels à négresses

Dès que l’esclavage fut officialisé – et très certainement avant-  s’ouvrirent en Europe, et en particulier à Paris, des maisons de prostitution dont les pensionnaires étaient recrutées en fonction de leur couleur de peau. En outre, il est attesté que des prostituées d’origine africaine opéraient individuellement, notamment dans les galeries du Palais-Royal.

Quel était le statut de ces prostituées ? Elles avaient évidemment des « protecteurs » et des »protectrices ». Il n’est pas impossible qu’étant esclaves aux Antilles à l’origine leurs maîtres les aient envoyées en Europe pour les exploiter sexuellement. La pratique était courante aux colonies.

Quels étaient les clients de ces prostituées ?

Des clients de toutes couleurs. Des compatriotes, certainement, qui ne manquaient pas en Europe et en particulier à Paris. Mais aussi des Européens, par suite d’un effet de mode et certainement d’une recherche d’exotisme. Le succès des « bordels à négresses » au XVIIIe siècle fut tel que des maquerelles ne disposant que de pensionnaires européennes en vinrent à se plaindre à la police pour concurrence déloyale.

Une brochure anonyme et bien informée de 1790, servant de guide aux provinciaux et recensant les maisons de passe parisiennes, évoque ainsi la question :

« Bordel de négresses

Chez Mlle Isabeau, ci-devant rue Neuve de Montmorency [auj. rue des Panoramas, 2e arrondissement] aujourd’hui rue Xaintonge [rue de Saintonge, 3e arrondissement] maison de M. Marchand, prêteur sur gages. Le prix n’y est point fixe.La négresse, la métisse et la mulâtresse y sont marchandées, comme on marchande les femmes d’une caravane »

S’agit-il de la Belle Isabeau, fille plus ou moins galante sous Louis XVI, reconvertie en maquerelle pendant la Révolution ?

Un guide du même ordre, toujours anonyme, mais de 1801 cette fois, évoque nommément une prostituée :

« Betzi, hôtel de la Chine, rue Neuve-des-Petits-Champs [auj. rue des Petits-Champs et Danielle-Casanova]. Sa figure est de celles qui peuvent plaire parmi les gens de sa couleur; quant à moi, ce teint noir me déplaît infiniment : chacun son goût. Cependant, sa démarche est aisée et elle est bien bâtie. »

Ce qui est intéressant, c’est que le préjugé de couleur intervient dans ce guide de 1801 – certainement pour être au goût du jour, Napoléon Bonaparte ayant pis le pouvoir et s’apprêtant à rétablir l’esclavage – alors qu’aucun jugement n’était porté dans la brochure imprimée aux débuts de la Révolution.

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